Observatoire des Baronnies Provençales, Moydans.


Du 13 au 17 Mai 2018


Observatoire des Baronnies Provençales, Moydans.

1. L'astrophotographie

1.1 Le site





Situé Au coeur du pays du Buech, à 820 m d'altitude dans le département des Hautes Alpes, l'Observatoire des Baronnies benéfiçie d'un ciel bien noir et contrasté et d'un nombre particulièrement élevé  de nuits claires.
Cette capacité nocturne exceptionnelle, ainsi que les performances impressionnantes du matériel mis à disposition et la philosophie du lieux ont été  les éléments déterminants qui nous ont amené à choisir ce site pour notre nouvelle aventure...



C'est en 2006 que le projet de Hélène et Marc Bretton vit le jour,  avec l'idée d'installer un ensemble de télescopes robotisés et pilotés à distance. Mais ce projet a connu depuis bien des évolutions, avec toujours cette même volonté de s'adapter à une demande très diversifiée...
Il repose avant tout sur la volonté de faire découvrir au grand public l'astronomie en lui proposant une immersion totale dans la haute technologie de l'astronomie moderne. L'astronome amateur a ainsi la possibilité  d'observer une nuit complète, sous coupole, avec un  télescope professionnel de 82 cm de diamètre et de 4 m 68 de focale.

Mais l' Observatoire des Baronnies, c'est bien plus encore...car il accueille des astronomes de tous niveaux...
Des amateurs expérimentés, qui peuvent laisser leur matériel d'observation sur place, et venir observer à leur guise en profitant des qualités exceptionnelles du site.
Des professionnels également, qui ont déposé un télescope sur le site, et font de l'imagerie à distance...
Sans oublier des laboratoires des recherche internationaux  qui  mandatent l' Observatoire, pour faire de la donnée autours de transite d'exoplanètes.


Ce projet, bénéficie de multiples financements émanant à la fois de l'Europe, mais aussi de l'Etat, de la Région ou bien encore de l' "A.D.E.M.E" (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie). Autant d'organismes qui ont su reconnaître et encourager le développement économique et touristique de la région. C'est ainsi pas moins de  l'équivalent de  50  emplois à temps plein qui ont pu être créer sur une période de 10 ans!!!

1.2 Notre Mission


Dans le cadre de cette nouvelle mission, nous avions, comme à notre habitude, rédigé un document "Cibles", base de travail sur laquelle nous souhaitions nous appuyer pour organiser nos nuits d'observation.

Nous avons pu bénéficier principalement de deux télescopes...



Un Télescope Newton à Fourche 500/1800 à F/D de 3.6, motorisé uniquement en Ascension Droite...
Cette particularité nous à amené à l'utiliser exclusivement en planétaire, et ainsi à réaliser quelques clichés de Jupiter...


Télescope Hyperion 820/4680
Et surtout, un Hyperion 820/4680 à F/D à 5.7

Caméra CCD FLI PL-025

Equipé d'une caméra CCD FLI PL-25 et d'une roue à filtre équipée de tous les filtres dont on peut avoir besoins...

Raquette de Commande...




Tout ceci, pilotable de la salle de commande, située juste sous la coupole...






Une séance de prise de vues s'appuie sur un protocole bien précis, avec un certain nombre de clairance à donner avant de lancer les séquences de prise de vues.
Chaque opérateur est affecté à un poste bien déterminé, et s'assure que les conditions sont  nominales avant de lancer la séquence de prises de vues...  




Poste météo, avec caméra Full Sky, moniteur de nuages, station météo, prévisions...



Poste Coupole, avec pointage du Télescope, orientation de la coupole, interrupteurs...


Poste CCD, contrôle des paramètres de prise de vue, sélection des filtres, déclenchement des séquences...



Et maintenant, voici quelques clichés réalisés lors de ces séquences



M51, 8X180" dans le LNIR,G,B à -30°C

NGC6545, 6X180" dans le L,R,G,B à -30°C


M13, 11X30" avec NIKON D700

M16, 1X300" dans le Ha,RR,G à -30°C


2. L'observation du transit de l'exoplanète TrES-2 b

2.1 Contexte

Dans le cadre d'une collaboration scientifique, Marc participe à un programme de  surveillance de transit d'exoplanètes. Du système TrES-2 en particulier, composé d'une étoile, TrES-2 a, et d'une exoplanète, TrES-2 b. Car depuis sa découverte en 2011, le suivi des courbes de transit de ce système a révélé une variation qui pourrait s'expliquer par la présence d'une seconde exoplanète, baptisée TrES-2 c. Afin d'obtenir un nombre suffisant de données photométriques permettant de prouver l'existence de cette seconde planète, une campagne internationale a été lancée afin d'enregistrer les différentes courbes de transit de TrES-2 b.

Et le soir du 17 Mai 2018, Marc nous convia à assister en directe  au passage de TrES-2 b devant son étoile ...Enfin, en directe, pas vraiment, puisque cette éclipse se déroulant à quelques 707 années-lumière de la Terre, celle ci s'est par conséquent produite aux alentours de l'an 1318!!!  Philippe V le Long , avant dernier monarque de la dynastie des Capétiens,commençait alors tout juste son règne, succédant à Philippe le Bel...

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Ephémérides Transit Exoplanètes



Il est maintenant aisé de trouver sur internet des sites donnant les heures de passages des différentes exoplanètes devant leur étoile. Pour n'en citer qu'un, on trouve par exemple ETD ( Exoplanet Transit Database), que l'on peut consulter ici

Sur ces tableaux, on trouve les heures de début et de fin de transit données en temps héliocentrique (par rapport au Soleil, donc UT) et non pas géocentrique (par rapport à la Terre, donc UTC)
La raison en est que le phénomène ne sera pas visible à la même heure, en fonction de la position à laquelle se trouvera la Terre au moment où la lumière nous parviendra...
En effet, si la Terre se trouve entre notre Soleil et l'exoplanète , la distance à parcourir par la lumière sera plus courte que si la Terre se trouve de l'autre coté du Soleil...
La différence est significative, puisque:
En sachant qu'entre la Terre et le Soleil il y a 150 000 000 km et que la vitesse de la lumière est de 300 000 km/s , alors le temps que met la lumière du Soleil pour venir à la Terre est de: 
(150 000 000)/(300 000) =500 secondes
soit 8 min et 30 secondes environ
Le phénomène pourra donc se produire de 8 min 30 s avant à 8 min 30 s après l'heure indiquée en UT...
Il conviendra donc de vérifier la position héliocentrique de la Terre afin de connaitre l'heure exacte de visibilité du phénomène sur la Terre...

Il existe 3 méthodes différentes permettant d'observer le transit d'une exoplanète:

- La méthode de la vitesse radiale
- La méthode de l'effet de microlentille gravitationnelle
- La méthode du transit

C'est cette dernière qui sera utilisée ici...
Lors du passage de la planète devant son étoile, une partie de la luminosité de l'étoile est cachée par la planète. Il suffit donc de mesurer le flux lumineux apparent de l'étoile au cours du temps et espérer voir ce flux diminuer, puis ré-augmenter, lorsque la planète aura fini son passage devant l'étoile.

Marc utilise pour cela un capteur extrêmement sensible, capable de mesurer une variation du flux lumineux de l'ordre de 1%
Une légère défocalisation de l'instrument de mesure, permet de stabiliser la lecture du flux lumineux.

Une mesure est prise à intervalles réguliers (ici, toutes les minutes), et apparaît petit à petit sur le graphique, révélant ainsi la courbe de transit.



Courbe de Transit de TrES-5 b

Voici celle que l'on a pu obtenir pour  TrES-2 a. Elle montre parfaitement la baisse de luminosité, correspondant au début de l'éclipse...( A noter ici que la fin de l'éclipse a été malheureusement perturbée par le passage de nuages.)

2.2 Interprétation de la Courbe de Transit


Une telle courbe de transit est incroyablement riche en informations, pour qui sait l'interpréter...
C'est ce que Marc nous a brillamment démontré, en nous amenant au travers d'un jeux de questions/réponses à calculer par nous même un certain nombre de paramètres relatifs à ce système planétaire.

Voyons comment...


En premier lieux, notons que cette courbe de transit nous donne quatre grandeurs:

- La période de transit, lorsqu'il est observé à plusieurs reprises et à intervalles réguliers.
- La variation relative du flux lumineux
- Le temps total de transit
- Le temps du transit total

De plus, il faut savoir que toute étude  d’exoplanète,  commence généralement par une estimation de la taille de l’étoile.
Pour cela, les astrophysiciens mesurent la courbe de vitesse radiale de l'étoile afin de déterminer son type spectrale (Ici, type "K1"), et en fonction de ce dernier, estimer son rayon (Re). Cette vitesse est mesurée grâce à l'effet Doppler, en décomposant la lumière de l'étoile pour avoir sa signature spectrale et observer le décalage au cours du temps vers le bleu (l'étoile se rapproche) ou vers le rouge (l'étoile s'éloigne).
Puis, à partir de la variation relative du flux lumineux ( ∆F / F )  et de l'approximation du rayon de l'étoile, la formule Rp =  (∆F / F ) Re nous donne une approximation cette fois ci du rayon de la planète (Rp). 

Grâce à cette méthode nous savons que le diamètre de TrES-5 b est de l'ordre  de  172 868 km



Revenons maintenant à la lecture de notre courbe...

On peut y voir, que la diminution du flux lumineux est linéaire et s'étend sur une période de 20 minutes environs (Elle semble commencer vers 23h10 et s'achever vers 23h30)
Notre exoplanète a donc mis 20 minutes à traverser le bord de contacte de l'étoile (temps écoulé entre le moment ou la planète entre en contact avec l'étoile, et le moment où la planète est pour la première fois entièrement à l'intérieur de l'étoile)
Sachant que son diamètre est de 172 868  km , elle a par conséquent parcouru 172 868  km en 20 min.
Nous pouvons en déduire que sa vitesse de déplacement est de l'ordre de 518 604 km/h

Maintenant, l'observation de TrES-2 a depuis sa découverte en 2011 nous apprend que sa périodicité est de 1.482 jours. Son transit a donc lieu tous les 1.482 jours.
Nous pouvons en déduire la distance parcourue entre 2 transit, c’est à dire le périmètre du cercle décrit par son orbite:

Distance parcourue par jour: 518 604 X 24 = 12 446 496 km
Distance parcourue par rotation orbitale: 12 446 496  X 1.482 = 18 445 707 km

Le périmètre du cercle décrit par son orbite est donc de 18 445 707 km

Connaissant cette valeur, nous pouvons maintenant aisément calculer la distance de TrES-2 a à son étoile...

La formule pour calculer le périmètre (p) d'un cercle étant:

p = 2r X π

isolons r

18 445 707 = 2r X 3.14
18 445 707 / 3.14 = 2r
18 445 707 / 3.14 / 2 = r
r =    2 937 214

Sur la base de notre courbe de transite, nous arrivons à une estimation de  la distance de TrES-2 a à son étoile de l’ordre de 2 937 214 km

La valeur officiellement reconnue à ce jour est de 0.02459 UA, soit  3 678 600 km…

Notre estimation, si elle ne nous permet pas de tomber précisément sur la valeur correcte, reste néanmoins satisfaisante et relativement proche de la réalité…


3. Et comme nous aimons profiter de nos expéditions astro pour faire un peu de tourisme, voici une petite présentation de la bien agréable  commune de Sisteron ...


Rocher de la Baume, Sisteron

Aujourd'hui petite ville industrielle et touristique, Sisteron peut pourtant s' enorgueillir d'un passé glorieux et riche en rebondissements...
En effet, sa position stratégique lui valut, dès l'époque romaine, la  construction d' un pont sur la Durance. Ce dernier constitua une voix de passage stratégique, et assura à la ville  un rayonnement sur la région  durant  plusieurs siècles...
Témoin de cette période prospère, la magnifique citadelle-forteresse  qui surplombe  la ville attend les touristes afin de leur conter ses passionnantes aventures épiques...
Les Frères Pontifes d'Hospitaliers obtinrent le rattachement de l'édifice à l'Ordre des Templiers...
Mais petit à petit, la multiplication des ponts sur la Durance finit par éteindre le rayonnement de Sisteron .



En conclusion je dirais que ce stage a eu l'avantage de nous permettre d'aller encore plus loin que notre travail d'astrophotographie pure.
Et pour cela, je tiens à remercier Marc, qui en nous faisant partager son travail d'observation d'exoplanètes, nous a permis d'avoir une approche relevant plus de l' astrophysique...(Cela nous ouvre de nouveaux horizons, pour nos prochaines expéditions astro...)
Il a également su  nous surprendre, notamment en nous permettant de nous faire une représentation mentale d'une éclipse se déroulant aux confins de l' Univers, et ce, simplement en nous expliquant comment interpréter des données et une courbe de transit... Expérience troublante!!!
Je tiens également à remercier Hélène pour son travail, son accueil, et ses délicates attentions...
Nous retournerons avec grand plaisir sur ce site d'exception et à l'accueil chaleureux...

Vidéo de l'expédition astro consultable içi




Photographier les Nébuleuses en couleur à l'aide de seulement deux filtres à bande étroite

Obtenir une image couleur des nébuleuses sous le ciel pollué des grandes villes, c'est possible. Et pour cela, deux filtres à bande étroite suffisent.
Normalement, afin de reconstituer la couleur, trois clichés sont nécessaires, afin d'en saisir les composantes Rouges,Vertes, et bleues.Il est néanmoins possible d'obtenir un résultat comparable, avec uniquement deux couches... C'est cette technique que j'ai souhaité tester.Voici comment j'ai procédé...



Au préalable, il faut savoir que l'emploi d'une caméra CCD monochrome est préférable, voir indispensable pour ce type de photographie.
Car si l'emploi de boîtiers photo numérique couleur reste possible (encore faut'il en avoir ôté le filtre anti-infrarouge),ces derniers restent bridés, car seule une partie de leurs cellules sensibles (photosites) ne pourront capter les précieux photons.
Les caméras CCD équipées de capteurs monochromes, nous permettent, par l'adjonction d'un filtre, de décider à quelle bande passante on souhaite que le capteur travaille.Cela permet d'une part de cibler précisément les bandes d'émissions les plus actives de l'objet photographié, et d'autre part de faire travailler   l'ensemble des photosites du capteur.


L'emploi d'un filtre H-alpha, sélectionnant une raie d'émission de l'hydrogène, nous fournit la couche rouge.
Cette raie spectrale constitue l'essentiel du rayonnement des nébuleuses ionisées. Le filtre H-Alpha est donc le plus efficace pour photographier les nébuleuses en ville. J'ai pour ma part choisi une bande passante de 7 nm.
Des temps de poses situées entre 5 à 20 minutes par cliché individuel sont adaptés à cette longueur d'onde, selon la luminosité de l'astre et la qualité du suivi.

L'emploi d'un filtre OIII, isolant la lumière de l'oxygène doublement ionisé, nous donne la composante bleu-vert de l'objet.
Cette source lumineuse est souvent la plus intense après la raie H-Alpha.Il faut savoir néanmoins que le signal dans cette longueur d'onde est beaucoup plus faible. Même si le signal semble quasi inexistant sur les clichés, il est important de réaliser la série d'image dans son intégralité, même si l'on a l'impression de n'enregistrer que du noir...Le précieux signal, très faible, est bien là!
Un temps d'exposition identique à celui des clichés en H-Alpha est recommandé.

La troisième couche, normalement obtenue à l'aide d'une série des prise de vues à l'aide d'un filtre SII, est obtenue en combinant les deux images précédentes. Sous photoshop, il suffit de coller l'image OIII sur l'image H-Alpha, de réduire l'opacité de "OIII" à 50%, et enfin d'aplatir l'image pour obtenir notre image synthétique. On lui attribue la composante verte de l'image.

Pour tester cette technique, j'ai donc réalisé 23 clichés de la Nébuleuse Planétaire "Hélix" , dans chacune de ces longueur d'onde.Chaque série d'image a été empilée à l'aide du logiciel Deepskystacker.
Pour ma part, je n'opère à ce stade aucun traitement sur les images obtenues. Je trouve cela un peu hasardeux, car il est alors impossible de savoir précisément ce qui se passe au fur et à mesure de nos transformations sur l'image.
Je préfère assembler d'abord les 3 couches, afin d'obtenir une composante RGB. Et ce n'est qu'à ce moment, que je travaille les "Courbes et Niveaux."
Voyons maintenant ce que j'ai pu obtenir...



23 Clichés de 300" en H-Alpha
Cette raie d'émission est très riche en informations, et de fins détails apparaissent déjà.

23 Clichés de 300" en OIII
Si le H-Alpha est impressionnant par sa qualité de détails, l'OIII, quant à lui, ne manquera pas de nous surprendre par son manque de signal. Il reste néanmoins primordial, car il renferme des informations différentes et complémentaires du H-Alpha, et servira à constituer la couche Bleue.
A noter qu'il a fallu opérer une correction de rotation du champs, car le suivi de l'objet ayant été interrompu entre les deux séries de clichées, l'orientation du capteur a changé...

Image Synthétique 
Cette image synthétique est la combinaison des deux premières, et sera affectée au vert...

Combinaison des 3 Couches

Une fois reconstituée (sous Photoshop), voici le résultat couleur...
Certes,le résultat ne peut égaler celui de la trichromie. Mais cette technique me semble un bon compromis, plus rapide, plus simple, plus économique, et aux résultats tout à fait convenables.
Une première étape peut-être, avant de se lancer dans la photographie à 3 bandes passantes (S.H.O)...?